Une opinion cosignée par Christophe Clersy et Pierre-Yves Lux, députés Ecolo mais aussi supporters de foot.
La diffusion du reportage » Le Millieu du Terrain » sur la RTBF nous a bouleversés en tant qu’écologistes, mais aussi et surtout en tant qu’amateurs de football. Le documentaire met en avant l’existence de commissions mirobolantes, de matches truqués et de pratiques de corruption. Le reportage pose de lourdes questions sur le modèle de gouvernance des clubs de la Pro League.
Cette longée dans les coulisses les plus sombres du monde du football en Belgique montre à quel point il reste du pain sur la planche pour que l’éthique soit placée au centre de la pratique sportive. Le sport reste un miroir de la société et il n’échappe malheureusement pas à ces dérapages.
Toutefois, ce fléau menace aujourd’hui très directement l’intégrité de nos compétitions sportives ainsi que la popularité du football. Ces pratiques peu reluisantes constituent une attaque fondamentale à l’esprit du fair-play qui fonde pourtant l’essence même des compétitions sportives.
Au coeur des révélations des journalistes d’investigation, il y a un personnage central : l’agent de joueur. Depuis une bonne dizaine d’années, le rôle de ces derniers a évolué notamment au niveau du rapport qu’ils entretiennent avec les clubs.
Dans ce cadre, il nous apparaît essentiel que les clubs ne rémunèrent plus directement un agent et que ce dernier ne joue plus aucun rôle dans la négociation relative au transfert d’un joueur entre deux clubs. Il s’agit d’une première balise fondamentale qui est directement du ressort des fédérations et qui permettrait de mettre fin à l’immunité et aux pratiques douteuses du « milieu de terrain ».
De manière prioritaire, nous estimons toutefois que face à ces révélations, le monde du football professionnel doit poser un geste fort pour tenter de restaurer la confiance envers toutes celles et tous ceux qui chaque semaine vont supporter leur équipe favorite dans les stades. Ces derniers sont ébranlés et ont depuis plusieurs années le sentiment que quelque chose leur échappe dans ce foot business.
Il y a quelques semaines, une série de clubs du top européen entendait au nom du profit mettre en place un projet de Super Ligue européenne dissidente. Onze autres clubs européens souhaitaient mettre sur pied un projet de compétition européenne concurrente de la Ligue des Champions actuelle, avec ving équipes, dont quinze palces auraient été réservées tous les ans aux fondateurs.
Des supporters ont alors exprimé avec force leur colère au point d’enterrer définitivement les ambitions de leurs dirigeants en la matière.
Le vent de la discorde a été tel qu’à Chelsea, les dirigeants ont permis à trois représentants des supporters d’assister aux réunions de son conseil d’administration.
Le rôle de ces représentants sera « de faire en sorte que le sentiment général des clubs supporters soit pris en compte dans les processus de prise de décision du club » a expliqué le club par voie de communiqué.
Nous pensons que l’inclusion des fans dans le processus de décisions des clubs constitue une balise essentielle pour rompre avec les pratiques dénoncées par les journalistes d’investigation.
La transparence s’impose vis-à-vis des amoureux du ballon rond. Si nous ne doutons pas de l’engagement sincère de nombre de dirigeants qui font réellement prévaloir les intérêts de leur clubs plutôt que l’appât du gain, il n’en reste pas moins que le doute subsiste à travers les comportements et prises de position d’autres. Dans ce cadre, quel meilleur garant des intérêts véritables d’un club que le supporter investi ?
En outre, il y a selon nous une forme d’urgence à développer un autre modèle économique à celui qu’imposent aujourd’hui les richissimes mécènes au niveau européen qui sont en passe de transformer notre Proleague en vitrine de seconde classe du foot business.
En 2020, en Ecosse, le Président des Glasgow Rangers a ainsi conclu un accord avec un club de supporters afin de leur vendre ses parts. Ces fans peuvent ainsi s’opposer à toute transaction que les supporters jugeront mauvaise et, donc, de protéger leur club.
C’est dans ce cadre que nous plaidons pour qu’une réflexion soit menée au sein de la Proleague afin que l’ensemble des clubs professionnels intègrent des représentants des supporters au sein de leurs organes de décision.
Il nous paraît également central que la Fédération Wallonie-Bruxelles joue un rôle moteur dans cette nouvelle dynamique. C’est en effet dès le plus jeune âge et à tous les niveaux de la pratique sportive que l’éthique doit s’imposer comme règle absolue et permettre d’éviter des débordements au plus hauts niveaux.
La nécessaire transparence et la restauration de l’éthique dans le football passera par cette étape préalable. Bon nombre de clubs en Europe ont franchi le cap, le football belge doit écrire une nouvelle page de son histoire glorieuse sur cette base.
Christophe Clersy
Pierre-Yves Lux
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